Faire affaire avec un professionnel, peu importe le domaine, devrait toujours être un gage de confiance, de qualité et d’intégrité. Cette réalité est immuable et touche toutes les professions, et ce même (et surtout) en période de surchauffe. En fait, c’est justement dans les moments les plus prenants qu’il nous faut, en tant que professionnels, redoubler de vigilance de manière à assurer une qualité de service pour se prémunir des pièges de l’industrie.
La période d’extrême ébullition des dernières années en immobilier suivie des présents temps d’incertitude doit forcer les différents intervenants à la réflexion. En effet, il peut être tentant de tourner les coins ronds à l’occasion, de manière à maximiser les résultats. En général, le tout peut se faire à l’avantage du client, mais à quel prix? C’est la problématique que soulève l’actualité récente alors que certains courtiers immobiliers se sont fait prendre à mettre sur pied des offres d’achat bidon dans le seul but de faire monter les enchères…1
De tels manquements peuvent entrainer de graves répercussions non seulement sur les courtiers en cause, mais également sur leur agence et, ultimement, sur l’industrie et la confiance du grand public. C’est pourquoi un petit rappel des différents devoirs du courtier immobilier et des possibles conséquences pour les parties prenantes, en cas de violation, nous paraît ici pertinent et nécessaire.
Comme c’est le cas pour la majorité des professions, le métier de courtier immobilier est encadré assez strictement par la loi. Plus précisément, la Loi sur le courtage immobilier (ci-après « Loi ») ainsi que le Règlement sur les conditions d’exercice d’une opération de courtage, sur la déontologie des courtiers et sur la publicité (ci-après « Règlement ») encadrent la pratique de la profession.
Alors que la Loi porte davantage sur les différents aspects pratiques de la réglementation tels que l’obtention du permis nécessaire ainsi que le fonctionnement de l’OACIQ, c’est le Règlement qui pose véritablement les bases déontologiques du courtage immobilier comme le rappellent les articles suivants :
Le tout remis dans son contexte, il n’est pas surprenant de constater les différentes dérives rapportées par La Presse dans une enquête2 récente qui met à mal la réputation de l’industrie et, ultimement, remet en question la protection du public.
En effet, il est impératif de garder à l’esprit que les parties à une transaction immobilière, vendeur comme acheteur, sont souvent des membres du public qui s’y connaissent peu en droit de l’immobilier. Plus encore, l’achat d’une résidence représente bien souvent la dépense d’une vie pour le justiciable qui s’endette alors pour les années à venir. De tels enjeux combinés au facteur émotif qui accompagnent bien souvent les transactions immobilières rendent certaines parties particulièrement vulnérables.
Un courtier immobilier doit donc faire preuve d’objectivité, de transparence et de professionnalisme en tout temps et s’abstenir de tirer avantage de la situation.
Faire fi de ces obligations ne peut qu’entraîner des conséquences équivoques pour les parties, le courtier ainsi que la profession dont la crédibilité sera mise à mal. En effet, il suffit de quelques cas d’abus médiatisés pour entacher sévèrement la confiance du public et cette dernière pourrait s’avérer difficile à récupérer. Dans un cas récent, un courtier qui n’a pas été suffisamment transparent sur son lien avec les vendeurs et l’état véritable d’une propriété s’est fait condamner à dédommager les acheteurs pour plusieurs dizaines de milliers de dollars3.
Plus encore, il ne faut pas oublier que l’OACIQ peut également enclencher des poursuites disciplinaires contre ses membres. Ce genre de mesures peut non seulement exposer les courtiers pris en faute à des sanctions pécuniaires, mais aussi (entre autres) à des heures de formation professionnelle.4
Ainsi que le suggère l’article d’Isabelle Dubé5, certains acheteurs, suivant des promesses d’achat bidon ainsi que de fausses représentations ont payé plusieurs milliers de dollars en trop pour leur maison de rêve. Indéniablement, ce préjudice pourrait exposer les responsables à de coûteuses poursuites civiles et disciplinaires. Or, il va sans dire que de tels recours ne manqueront pas d’affecter les opérations, les finances et la réputation des courtiers et agences concernées pour une période indéfinie.
En définitive, le mot à retenir est PRUDENCE. Bien que la tentation puisse être forte de contourner certaines règles suivant la nature du marché et son évolution, le fait de franchir la ligne invisible de la déontologie entraînera, tôt ou tard, des répercussions négatives sur toutes les parties prenantes. Les courtiers ont donc intérêt à faire preuve de rigueur et de transparence dans l’exercice de leur art.
2 - Idem
3 - Gaudet c. Paris, 2018 QCCS 5894
4 - Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec c. Milhomme, 2023 CanLII 41126 (AC OACIQ)
5 - Voir note 1.